Saturday, July 15, 2006

Tracks of my tears #4


"Quand je vais retourner sur la route, ce sera un nouvel Otis Redding" - Automne 1967

"Non, mec, ça va être mon premier numéro un. C'est la meilleure chanson que j'ai jamais enregistrée" Otis R. 1967

La tournée Stax/volt s'acheva en mars et tous les mods anglais avaient vu la Vierge: Otis Redding se cognant la main sur le coeur durant "My Girl"...Maintenant, ces rosbeefs ne juraient que par la soul - ce qui donnera le signal de toute la chose northern. Le Melody Maker n'en croyait pas ces yeux: Otis avait détrôné Elvis du trône du Meilleur Chanteur du Monde... Une couronne que le King garda durant dix ans! Something's gonna change... Et puis Otis avait réussi là où James avait échoué (bien qu'il n'ai jamais essayé) : le crossover ultime... Les Blancs l'avaient adopté. Ce n'était pas qu'un simple concours de circonstance: un Noir avait détrôné un Blanc...

C'était à Monterey que les choses évoluèrent. J'ai vu la vidéo du festival de Monterey 67 et j'en suis tombé sur le cul. Ce mec avec sa petite artillerie et ses musiciens costumés tout de vert vêtus alors que le psychédélisme explose au monde avaient anéanti toute la concurrence en cinq titres: Jefferson Airplane, Byrds, Canned Heat... Par sa voix, sa foi en son Art (ou en Soi ce qui revient à la même chose), ce gros noir au gros nez ferma le clapet de tout le monde...

Et puis, la Pop music suscitait des vocations. Otis voulait voler au dessus de la mêlée - en statue du Commandeur - et ne plus se voir confiner aux charts R&B, n'être admis que dans certains hôtels...

Dock of the Bay donc... On entendait la marée avec un Otis apaisé. Plus du tout les cuivres fievreux de "Shake" ou "Respect". Il posait sa voix sans pour autant en susciter moins. Il ne s'éraillait plus la voix comme lorsqu'il tentait de battre Sam & Dave à leurs propres jeux ("Ces enfoirés"). Il planait, osant la contemplation sur soi même (on se regarde, on se contemple au plus profond de soi-même et tous les remords/regrets accumulés depuis l'enfance se présentent sous nos yeux et pourtant il faut continuer à vivre sans se renier...) - alors que la planête rêvait "Dance To The music" de Sly et sa Family, "Born to Be Wild" de Steppenwolf, "Jumpin Jack Flash" des Stones, "Sunshine of Your Love" de Cream dans le juke box mondial - jusqu'au sifflement final. Y'a t-il un disque de 1967/1968 qui se termine de cette manière? Non. Tout le monde veut aller plus haut, plus loin mais personne ne se (re)posait de cette façon.

L'autre jour, j'étais au plan d'eau du Canada à Beauvais (cherchez l'erreur) avec des amis et je n'avais que cette chanson dans la caboche... Le Pacifique déroulant le tapis bleu azur où l'on ne sait où se termine l'horizon (où le ciel rencontre la terre...), le soleil se couche et les têtards gazouillent d'effroi sous les assauts de personnes bien intentionnées...

Mettant en boite Dock of the Bay le 07/12/67 avec Booker T. & The MG's... Mr Humble tenait à respecter jusqu'au bout ses engagements... Un engagement qui l'amena, avec les Bar-Kays l'autre groupe maison Stax, dans le Wisconsin... A 15h28, l'avion d'Otis pointa du nez dans le lac Monona...

Pour les funérailles, TOUT LE MONDE était là... Soul Clan, Johnnie Taylor et Joe Simon portaient le cerceuil et 4500 personnes s'agglutinaient autour. James Brown, dans un geste le refletant à la perfection, essaya jusqu'à la fin d'accompagner son frère de sang en corbillard mais la foule l'empêchait d'y arriver. Johnny Jenkins dit de cela "voilà ce qui arrive à un Nègre qui pense" faisant explicitement référence aux destinées semblables des désirs d'émancipations de Sam Cooke et Otis. Saviez-vous que c'est la CIA qui s'est chargé de rendre Lennon inoffensif? Qu'un Macca en a remplacé un autre à partir d'"Abbey Road"? Que l'on a retrouvé le corps d'ELVIS avec les rouflaquettes qui se décollaient...?

"(Sittin' On) The Dock of the Bay" atteignit les Numero Uno des charts R&B & Pop, une sortie posthume donc. Otis avait eu raison... Mais nous ne saurons jamais si les évènements eurent une importance prépondérante...

Ps: depuis, cette chanson est maintes et maintes fois reprises... Quelquefois, certains osent la jouer sans savoir siffler. Ah! Ah! Pardonne Mais N' Oublie Jamais...

Ps2: pour ceux que ça intéresse... William Bell a signé un hommage troublant (& trop conscient) à... qui vous savez... dans une chanson intitulée "A Tribute To A King".

Thanks Peter Guralnik et son indispensable Sweet Soul Music.